Au premier coup d’œil sur la plaine fourmillant de soldats ennemis, il cessa de se demander s’il avait ou non chargé son fusil. Avant même d’être prêt à commencer – avant de s’être dit à lui-même qu’il allait se battre, il épaulait son fusil d’un geste sûr et net, et tirait au hasard. Ensuite il fit fonctionner son arme comme une machine, automatiquement. Il perdait soudain tout souci de lui-même, et ne pensait plus aux menaces du destin. Il n’était plus un homme, mais le membre quelconque d’un grand corps.
La Conquête du courage est le chef-d’oeuvre de Stephen Crane (1871-1900), journaliste, écrivain, ami de Joseph Conrad et d’Henry James.