Marcel Proust, À propos de Baudelaire
À côté d’un livre comme Les Fleurs du mal, comme l’œuvre immense d’Hugo paraît molle, vague, sans accent ! Hugo n’a cessé de parler de la mort, mais avec le détachement d’un gros mangeur, et d’un grand jouisseur. Peut-être, hélas ! faut-il contenir la mort prochaine en soi, être menacé d’aphasie comme Baudelaire, pour avoir cette lucidité dans la souffrance véritable, ces accents religieux dans les pièces sataniques :
Il faut que le gibier paye le vieux chasseur..
Avez-vous donc pu croire, hypocrites surpris,
Qu’on se moque du maître et qu’avec lui l’on triche,
Et qu’il soit naturel de recevoir deux prix,
D’aller au Ciel et d’être riche ?