Joseph Roth

Joseph Roth aux éditions Sillage:

roth1894 : Naissance de Moses Joseph Roth, le 2 septembre, à Brody, en Galicie – une province reculée de l’Empire austro-hongrois, située dans l’actuelle Ukraine. La mère de l’enfant, Maria Grübel, appartient à une famille de négociants juifs. Nachum Roth, son père, issu d’une lignée de juifs hassidiques, travaille comme représentant pour une firme de céréales hambourgeoise. Pris de démence peu avant la naissance de l’enfant, il doit être interné. Il ne sera plus qu’exceptionnellement question de lui dans la famille de Joseph, qui ne le rencontrera pas et prêtera de multiples identités à ce père absent, se disant fils naturel d’un haut fonctionnaire autrichien ou d’un officier de l’armée impériale.

1905 : Entrée de Moses Joseph Roth au Kronprinz-Rudolf-Gymnasium, un établissement prestigieux. Il s’y montre bon élève.

1910 : Mort de son père.

1913 : Le jeune homme entame des études de philologie à Lemberg (actuellement Lviv), qu’il poursuit l’année suivante à Vienne. À cette époque, il abandonne le prénom de Moses, ne conservant que celui de Joseph.

1916 : Sert dans l’armée autrichienne. Roth dira plus tard avoir été fait prisonnier par l’armée russe, mais son témoignage est peu fiable, l’auteur ayant pour habitude d’enjoliver le récit de certains épisodes de sa biographie. Il dira avoir été médaillé et, plus âgé, prétendra souvent être un officier autrichien catholique. Pendant la guerre, Roth publie articles et poèmes dans des revues pragoises ou viennoises.

1918 : Chute de l’Empire austro-hongrois. Sa décadence fournira, avec l’évocation de la vie des juifs de l’Est, l’un des deux grands thèmes de l’œuvre de Roth. À Vienne, il travaille pour le quotidien Neuer Tag.

1920 : Déménagement pour Berlin.

1922 : Sa mère meurt d’un cancer. Roth épouse Friederike Reichler.

1923 : De retour à Vienne, il travaille comme correspondant pour le Berliner Börsenkurier et le Prager Tagblatt. Aux mois d’octobre et de novembre, parution en feuilleton de son roman La Toile d’araignée (Das Spinnennetz). L’année suivante, parution de Hôtel Savoy (Hotel Savoy) et de La Rébellion (Die Rebellion).

1925 : Correspondant du Frankfurter Zeitung, il effectue à partir de cette date de nombreux séjours en France, Pologne, Autriche, Allemagne, Italie.

1926 : Visite la Russie. À son retour, rompt avec le socialisme pour devenir un des plus énergiques soutiens de la monarchie habsbourgeoise et de son prétendant, Otto von Habsburg.

1927 : Publication du roman Flucht ohne Ende (La Fuite sans fin) et d’un essai, Juden auf Wanderschaft (Juifs en errance).

1928 : Zipper und sein Vater (Zipper et son père). Rencontre Stefan Zweig, avec qui il se lie d’amitié. L’écrivain et ses proches apporteront régulièrement à Roth un soutien matériel ; ils l’aideront également à se faire connaître en France. Sa femme, qui montre des signes de schizophrénie depuis l’année précédente, doit être placée dans une institution. Roth entame une liaison avec Andrea Manga Bell, fille d’une Allemande et d’un pianiste noir cubain, épouse d’un planteur camerounais.

1929 : Publication de Rechts und Links (Gauche et droite).

1930 : Publication de Hiob (Le Poids de la grâce), qui rencontre un succès immédiat.

1932 : Parution de Radetzkymarsch (La Marche de Radetzky), considéré comme son chef-d’œuvre. Le roman retrace le déclin d’une famille de militaires et de fonctionnaires durant les dernières années de la dynastie des Habsbourg.

1933 : Le 30 janvier, jour de la nomination d’Hitler au poste de chancelier du Reich, Roth s’installe à Paris en compagnie d’Andrea Manga Bell. Interdit de publication en Allemagne et privé de ses droits d’auteur, il sera désormais publié par des maisons néerlandaises ayant créé des collections à destination des Allemands en exil. Son épouse est internée dans un hôpital psychiatrique.

1934 : Malade, Roth est incapable de respecter les délais que lui imposent ses éditeurs ; ses difficultés financières s’aggravent. Il emprunte de l’argent à Stefan Zweig. À l’été, il se rend à Nice en compagnie d’Andrea Manga Bell, où il partage une maison avec Hermann Kesten et Heinrich Mann. Se rapproche des milieux catholiques. Parution de Der Antichrist (L’Antéchrist).

1935 : Dégradation de ses relations avec ses éditeurs, qui refusent de lui verser des avances pour des manuscrits inachevés. Incapable de payer la pension de sa femme, Roth songe à demander le divorce. Grâce à l’intervention de ses amis Soma Morgenstern et Walter Landauer, son épouse est admise gratuitement à l’hôpital Mauer-Öhling à Amstetten – Roth prendra l’habitude de la déclarer décédée. Séjours à Vienne, Nice, Marseille, Paris et Amsterdam. Entame une collaboration avec la revue autrichienne Der Christliche Ständestaat. Publication d’articles, entre autres dans les revues Das neue Tagebuch et Wiener Montagszeitung.

1936 : Rupture avec Andrea Manga Bell. Roth mange très peu, boit beaucoup et sa santé se dégrade considérablement. Il demande de l’aide à Zweig et à Landauer. Lors d’un séjour en Belgique, il rend visite à Otto von Habsburg et rencontre la romancière Irmgard Keun, avec qui il se rend à Zürich et à Vienne. Commence la rédaction de Das falsche Gewicht (Les fausses mesures). Publication de Beichte eines Mörders (Confession d’un assassin) et de Die hundert Tage (Les Cent jours).

1937 : Accompagné d’Irmgard Keun, Roth entame une tournée de conférences en Pologne, suivie de séjours à Salzbourg, Vienne, Bruxelles. Das falsche Gewicht (Les fausses mesures) paraît chez l’éditeur Querido à Amsterdam. Nouvelle demande d’aide à Stefan Zweig. Retour à Paris.

1938 : Dernier séjour à Vienne. Face aux menaces d’annexion allemande, Roth essaie de plaider la cause d’Otto von Habsburg auprès du chancelier Schuschnigg : il estime en effet que le prétendant au trône est le seul homme capable de s’opposer aux nazis. Le 12 mars, annexion de l’Autriche. L’écrivain vient en aide à de nombreux émigrés, notamment au sein de l’American Guild for German Cultural Freedom. Il participe également à des réunions du Comité de défense des écrivains allemands et du Congrès international pour la défense de la culture en faveur de l’Autriche. Malgré son épuisement, il se rend à Amsterdam pour rencontrer son éditeur. Parution de Die Kapuzinergruft (La Crypte des capucins).

1939 : Publie une série d’articles dans la revue monarchiste Die Österreichische Post. Son état de santé devient inquiétant. Ses amis Soma Morgenstern, Ludwig Marcuse, Stefan Fingal et Jean Janès l’assistent financièrement. Le 24 mai, apprenant le suicide de son ami Ernst Toller, Roth s’effondre. Transporté à l’hôpital Necker, il meurt trois jours plus tard, le 27. Il est enterré au cimetière de Thiais. Ses papiers sont rassemblés par Friederike Zweig. L’année suivante, en juillet, son épouse sera euthanasiée par les nazis.


Bibliographie

La première édition de langue allemande de Das falsche Gewicht parut à Amsterdam, chez l’éditeur Querido, en 1937.
La première traduction française, due à Blanche Gidon, parut sous le titre Les Fausses Mesures à Paris, aux Éditions du Bateau Ivre, en 1946.

Œuvres de Joseph Roth

Joseph Roth Werke, 6 vol., Cologne, Kiepenheuer & Witsch, 1989-1991 (1. Das journalistische Werk, 1915-1923 ; 2. Das journalistische Werk, 1924-1928 ; 3. Das journalistische Werk, 1929-1939 ; 4. Romane und Erzählungen, 1916-1929 ; 5. Romane und Erzählungen, 1930-1936 ; 6. Romane und Erzählungen, 1936-1940)

Correspondance

Briefe 1911-1939, Hermann Kesten (éd.), Cologne, Kiepenheuer & Witsch, 1970.

Traductions

Chroniques, articles, essais

À Berlin, trad. de Pierre Gallissaires, Monaco, Anatolia/Éd. du Rocher, 2003.
Automne à Berlin, trad. de Nicole Casanova, Paris, La Quinzaine littéraire/Louis Vuitton, 2000.
Croquis de voyage, trad. de Jean Ruffet, Paris, Éd. du Seuil, 1994.
La Filiale de l’enfer, trad. de Claire de Oliveira, Paris, Éd. du Seuil, 2005.
Le Genre féminin, trad. de Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2006.
Juifs en errance, suivi de L’Antéchrist, trad. de Michel-François Demet, Paris, Éd. du Seuil, 1986.
Symptômes viennois, trad. de Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2004.
Une heure avant la fin du monde, trad. de Nicole Casanova, Paris, Liana Levi, 2003.

Romans et nouvelles

Conte de la 1002e nuit, trad. de Françoise Bresson, Paris, Gallimard, 1973.
La Crypte des capucins, trad. de Blanche Gidon, Paris, Plon, 1940.
Le Deuxième Amour : histoires et portraits, trad. de Jean Ruffet, Monaco, Anatolia/Éd. du Rocher, 2005.
La Fuite sans fin, trad. de Romana Altdorf et René Jouglet, Paris, Gallimard, 1929.
Gauche et droite, trad. de Jean Ruffet, Paris, Éd. du Seuil, 2000.
Hôtel Savoy, trad. de Françoise Bresson, Paris, Gallimard, 1969.
Job, roman d’un simple juif, trad. de Charles Reber, Paris, Valois, 1931 (nouvelle traduction sous le titre Le Poids de la grâce, par Paule Hofer-Bury, Paris, Calmann-Lévy, 1965).
La Légende du saint buveur, trad. de Dominique Dubuy et Claude Riehl, Paris, Éd. du Seuil, 1986.
Le Marchand de corail, trad. de Blanche Gidon et Stéphane Pesnel, Paris, Éd. du Seuil, 1996.
La Marche de Radetzky, trad. de Blanche Gidon, Paris, Plon, 1934 (trad. revue par Alain Huriot, Paris, Éd. du Seuil, 1982).
Notre assassin, trad. de Blanche Gidon, Paris, R. Laffont, 1947.
Le Prophète muet, trad. de Michel-François Demet, Paris, Gallimard, 1972.
La Révolte, trad. de Charles Reber, Paris, Valois, 1930 (nouvelle traduction sous le titre La Rébellion, par Dominique Dubuy et Claude Riehl, Paris, Éd. du Seuil, 1988).
Le Roman des Cent-Jours, trad. de Blanche Gidon, Paris, Grasset, 1937.
Tarabas : un hôte sur cette terre, trad. de Michel-François Demet, Paris, Éd. du Seuil, 1985.
La Toile d’araignée, trad. de Marie-France Charrasse, Paris, Gallimard, 1970.
Zipper et son père, trad. de Jean Ruffet, Paris, Éd. du Seuil, 2004.

Correspondance

Lettres choisies : 1911-1939, trad. de Stéphane Pesnel, Paris, Éd. du Seuil, 2007.

Ouvrages critiques

Arnold, Heinz Ludwig, Joseph Roth, Munich, Text + Kritik, 1974.
Bronsen David (éd.), Joseph Roth und die Tradition : Aufsatz- und Materialiensammlung, Darmstadt, Agora, 1975.
Hackert Fritz, Kessler Michael (éd.), Joseph Roth : Interpretation, Kritik, Rezeption. Akten des internationalen, interdisziplinären Symposions, 1989, Akademie der Diözese Rottenburg-Stuttgart, Tübingen, Stauffenburg, 1990.
Hackert Fritz, Kulturpessimismus und Erzählform : Studien zu Joseph Roths Leben und Werk, Berne, Peter Lang, 1967.
Kraske Bernd (éd.), Joseph Roth : Werk und Wirkung, Bonn, Bouvier, 1988.
Lunzer Heinz, Lunzer-Talos Victoria, Joseph Roth im Exil in Paris 1933 bis 1939, Wien, Dokumentationsstelle für neuere österreichische Literatur, 2008.
Stillmark Alexander (éd.), Joseph Roth : der Sieg über die Zeit. Londoner Symposium, Stuttgart, Heinz, 1996.
Weber Albrecht, Joseph Roth : Das falsche Gewicht. Interpretation, Munich, Oldenbourg Verlag, 1968.

En français

Bronsen David, Joseph Roth, éd. rev. et abrégée par Katharina Ochse, trad. de René Wintzen, Paris, Éd. du Seuil, 1994.
Céllerier Henri, « Une patrie pour un émigré : Joseph Roth établi en France », in Austriaca, n°19, Rouen, Université de Rouen/Centre d’études et de recherches autrichiennes, janvier 1984, p. 49-68.
Chevassus-Marchionni Valérie, Le « roman original » de Joseph Roth : analyse des stratégies de la création littéraire dans l’oeuvre de Joseph Roth, Berne, Peter Lang, 2002.
Cziffra Géza von, Joseph Roth, le saint buveur, trad. de l’allemand par Jean Ruffet, Monaco, Anatolia/Éd. du Rocher, 2003.
Ksiazenicer-Matheron Carole, Les Temps de la fin : Roth, Singer, Boulgakov, Paris, Honoré Champion, 2006.
Magris Claudio, Loin d’où ? Joseph Roth et la tradition juive-orientale, Paris, Éd. du Seuil, 2009 (à paraître).
Morgenstern Soma, Fuite et fin de Joseph Roth, trad. de l’allemand par Denis Authier, Paris, Liana Levi, 1997.
Pesnel Stéphane, Totalité et fragmentarité dans l’oeuvre romanesque de Joseph Roth, Berne, Peter Lang, 2000.
Ravy Gilbert (éd.), Joseph Roth, Austriaca, n° 30, Rouen, Université de Rouen/Centre d’études et de recherches autrichiennes, juin 1990.